Une équipe de recherche de la Fondation IVI en collaboration avec l’IIS La Fe a isolé des altérations au niveau du tissu utérin de femmes atteintes d’endométriose. Ces altérations pourraient expliquer en partie les problèmes de fertilité et les complications de grossesse associées à cette pathologie. Ces découvertes ouvrent la porte à des traitements plus personnalisés et à de nouvelles stratégies de diagnostic précoce.
Mieux comprendre l’endométriose et son impact sur la grossesse
L’endométriose touche environ 10 % des femmes en âge reproductif. Au-delà des douleurs menstruelles intenses qui la caractérisent habituellement, cette maladie peut rendre difficile la conception et accroître le risque de complications durant la grossesse, comme la pré-éclampsie ou la fausse couche.
Or si on en connaît les effets, bien des questions restent encore sans réponse par rapport à la manière dont l’endométriose influence la fertilité et le déroulement de la grossesse. Ainsi, la Fondation IVI, aux côtés de l’Institut de recherche sanitaire La Fe (IIS La Fe), a fait un grand pas en avant pour mieux comprendre le rôle de l’endomètre, ce tissu qui recouvre la paroi intérieure de l’utérus et où se produit l’implantation de l’embryon.
Les résultats de ce travail ont été présentés par l’étudiante pré-doctorante Alba Bas lors du 81ème Congrès de la Société américaine de médecine reproductive (ASRM) qui s’est déroulé à San Antonio (Texas). Ils offrent de nouvelles pistes par rapport aux mécanismes biologiques qui pourraient sous-tendre les difficultés reproductives qu’éprouvent les femmes touchées par l’endométriose.
L’endomètre vu de près : point de départ de l’étude
L’étude fait partie du projet emmené par la Dre. Hortensia Ferrero, chercheuse de la Fondation IVI et responsable du groupe de recherche « Traitement et diagnostic des maladies utérines » de l’IIS La Fe.
Son objectif : identifier les différences au niveau des protéines de l’endomètre de femmes souffrant d’endométriose par rapport à des femmes qui n’ont pas cette maladie. Le but est de découvrir d’éventuelles altérations associées aux difficultés de reproduction.
Ainsi, l’équipe a analysé le profil protéomique —c’est-à-dire l’ensemble complet des protéines— de ce tissu. Les protéines sont des pièces essentielles du bon fonctionnement cellulaire, et leurs altérations peuvent indiquer des déséquilibres qui influencent la capacité de l’endomètre à accueillir et développer une grossesse.
Les organoïdes endométriaux : un modèle innovateur
L’un des plus grands défis que pose l’étude de l’endomètre lors de la grossesse est qu’il n’est pas possible d’obtenir des échantillons réels de tissu utérin de femmes enceintes. Pour surmonter cet obstacle, l’équipe de la Dre. Ferrero a développé en laboratoire un modèle de « mini-endomètre » appelé organoïdes endométriaux.
Ces organoïdes sont des structures tridimensionnelles créées à partir de cellules de l’endomètre lui-même, capables de reproduire le comportement du tissu utérin sous différentes conditions. Dans ce cas, l’équipe de recherche les a exposés à des hormones de grossesse pour simuler les premières étapes de la gestation.
« Grâce à l’utilisation de modèles avancés de culture in vitro en 3D d’organoïdes endométriaux, nous reproduisons en laboratoire le tissu utérin et créons des conditions similaires à celles du début de la gestation. Nous avons ainsi pu observer que l’endomètre des femmes souffrant d’endométriose présente des altérations au niveau de multiples protéines essentielles pour une grossesse saine », explique la Dre. Ferrero, chercheuse principale de l’étude.
6 000 protéines mises à examen
L’analyse menée a été exhaustive, puisqu’elle a porté sur plus de 6 000 protéines du tissu endométrial. De ce chiffre, 363 protéines ont révélé des différences significatives entre le groupe des femmes atteintes d’endométriose et le groupe de contrôle.
Mais le plus révélateur a été l’identification de 35 protéines exclusives de l’endomètre atteint d’endométriose, altérations qui n’ont pas été relevées chez les femmes saines.
Ces protéines sont impliquées dans des processus clé pour le bon déroulement d’une grossesse, comme le métabolisme, la production d’énergie, la structure cellulaire et la tolérance immunologique. Il s’agit dans tous les cas de mécanismes essentiels pour permettre à l’embryon de s’implanter correctement et à la grossesse d’évoluer sans complications.
« Ces découvertes nous permettent de mieux comprendre les mécanismes moléculaires qui prennent place dans l’endomètre et entraînent de manière sous-jacente des complications durant la grossesse chez les femmes atteintes d’endométriose », ajoute la Dre. Ferrero. « À long terme, cette information peut s’avérer fondamentale pour le développement de traitements personnalisés et de stratégies de diagnostic précoce qui amélioreront la santé reproductive de ces patientes. »
Vers une médecine reproductive plus personnalisée
Les résultats de cette recherche ne nous aident pas seulement à comprendre pourquoi l’endométriose peut avoir une influence sur la grossesse, ils ouvrent aussi de nouvelles voies pour le développement de thérapies spécifiques.
L’identification des protéines impliquées dans les défaillances implantatoires ou dans les altérations du milieu utérin permettraient aux spécialistes de concevoir des traitements adaptés au profil biologique de chaque patiente, améliorant ainsi ses chances de réussite reproductive.
De la même manière, cette connaissance pourrait faciliter le développement de tests diagnostiques précoces. Elle contribue aussi à détecter les déséquilibres endométriaux avant que les complications n’apparaissent, de sorte à pouvoir intervenir plus efficacement.
En définitive, l’étude pose les bases d’une médecine reproductive plus personnalisée et préventive, orientée non seulement vers l’obtention de grossesses mais aussi vers leur déroulement dans les meilleures conditions possibles.
Un regard vers l’avenir
L’endométriose reste une maladie entourée d’inconnues mais chaque avancée scientifique contribue à éclaircir un peu plus le chemin. Ce travail, emmené par la Fondation IVI, représente une étape décisive vers la compréhension des mécanismes moléculaires qui font le lien entre endométriose, infertilité et complications lors de la grossesse.
La recherche présentée dans le cadre de l’un des congrès les plus importants du domaine de la médecine reproductive, vient consolider l’engagement de la Fondation IVI envers la science, l’innovation et la santé des femmes.
En résumé
La présente étude a dévoilé que l’endomètre des femmes atteintes d’endométriose présente des altérations au niveau des protéines fondamentales pour le début de la grossesse. Cette découverte aide à expliquer certaines des difficultés auxquelles se heurtent les femmes pour concevoir et mener une grossesse à terme, tout en ouvrant la porte à de nouvelles solutions cliniques fondées sur la biologie individuelle de chaque patiente.
Comprendre la manière de répondre de l’endomètre est fondamental pour améliorer le futur de nombreuses femmes qui souffrent d’endométriose. Parce que chaque pas en avant de la science nous rapproche un peu plus d’une grossesse plus saine et d’une médecine reproductive plus humaine et personnalisée.
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